Les grands indices sont soumis à une forte pression baissière et à une hausse de la volatilité depuis le 10 juillet. Le compartiment obligataire et les « proxys bonds » (**) que sont les secteurs Services aux collectivités, Télécoms ou Immobilier profitent de la correction des marchés.
Marchés
- Le Nasdaq100 a perdu près de -14% depuis 3 semaines. Ce qui s’apparentait, dans un premier temps, à une rotation vers les valeurs moyennes et financières s’est transformé la semaine dernière en une correction en bonne et due forme.
- La nervosité des investisseurs est liée à une convergence simultanée de différents facteurs. La forte progression de la volatilité des marchés est liée en premier mieux à la décision de la BOJ (Banque du Japon) d’augmenter ses taux de 25bp (points de base) assorti d’un discours plus offensif sur un resserrement monétaire à venir. Cette décision a entraîné une forte hausse du Yen qui a enclenché le débouclage forcé des opérations de « carry trade », stratégie consistant à s’endetter en yen à faible taux pour investir sur des actifs risqués américains ou mieux rémunérés, provoquant la vente massive d’actions US et à moindre degré européennes. La hausse brutale du yen a fait plonger le Nikkei225 dans un véritable krach avec une baisse de -13% lundi, compensée en partie par le rebond du jour (+9%).
- Les stratégies de short de volatilité (se positionner à la baisse sur le VIX), qui ont bien fonctionné pendant plusieurs mois, sont également mises à mal par le fort rebond de nervosité des marchés, ce qui provoque une hausse du VIX encore plus forte du fait de l’arrêt de ces stratégies.
- Cette crise se produit dans un contexte de dégradation macro-économique : les indicateurs avancés faiblissent nettement en Europe, aux Etats-Unis et en Chine notamment au niveau de la consommation des ménages et de l’activité manufacturière. De plus, le marché de l’emploi ralentit sensiblement aux Etats-Unis avec des inscriptions au chômage en nette hausse et des créations d’emplois non-agricoles en nette baisse à 114K contre 175K anticipés par le consensus. Le taux de chômage a augmenté de 4.1% à 4.3% et les augmentations de salaires ralentissent à 3.6% en rythme annuel contre 3.8% le mois dernier.
- Pour autant, les données macro-économiques sont loin d’être catastrophiques. La croissance du PIB US au 2ème trimestre 2024 (T2-2024) est plus forte que prévue et les résultats d’entreprises continuent d’être revus à la hausse aux Etats-Unis pour 2024.
- Néanmoins, la tendance est mauvaise et les investisseurs réévaluent à la hausse le risque de récession à fin 2024 ou début 2025. Surtout la FED est suspectée d’être à nouveau en retard sur le cycle économique et d’intervenir trop tardivement sur les taux, comme cela avait été le cas au début de la phase d’inflation en 2022. Cependant, une donnée ne fait pas une tendance et la prochaine publication sur l’emploi US début septembre sera primordiale pour confirmer ou non le ralentissement des embauches et l’augmentation du chômage.
- Un autre facteur à prendre en compte est de nature géopolitique, la guerre potentiellement imminente entre l’Iran et ses alliés et Israël avec son lot d’incertitudes notamment sur l’approvisionnement en pétrole et la déstabilisation possible de la région. C’est un facteur qui pourrait aggraver le ralentissement économique en cours et plonger l’économie mondiale en récession.
- La faiblesse traditionnelle des volumes au mois d’Août et une saisonnalité défavorable (la période mi-juillet à fin septembre / mi-octobre est, en moyenne, la moins favorable sur les marchés actions depuis plus de 30 ans) a peut-être également joué un rôle dans l’amplification de la correction des derniers jours. Les futures de volatilité (indice de volatilité à terme) n’indiquent pas d’augmentation du VIX à 1 ou 2 mois. De plus, les résultats des grandes entreprises technologiques comme Meta / Facebook, AMD ou Apple ont été dans l’ensemble rassurants.
- Une possible guerre régionale d’ampleur au Moyen-Orient et la spirale baissière des marchés japonais représentent néanmoins des menaces significatives à court terme (mais les guerres ont en général un impact peu durable sur les marchés comme on a pu le constater à l’occasion de la guerre entre la Russie et l’Ukraine en 2022), avec une nouvelle envolée de la volatilité dans les prochains jours. L’impact récessif de ces facteurs n’est pas non plus à sous-estimer -notamment en cas d’envolée du pétrole-, mais il devrait également être pris en compte par les banques centrales qui pourraient accélérer les baisses de taux.
- Le rendement à 10 ans US est passé nettement sous les 4% à 3.8% du fait du ralentissement économique perçu à travers les dernières données et les anticipations de baisse de taux qui sont révisées à la hausse par le consensus. Celui-ci prévoit désormais 3 baisses de taux d’ici la fin d’année pour un total de 100 bp (points de base).
- Cette détente obligataire améliore nettement les conditions financières des entreprises et des ménages, ainsi que l’accès à l’immobilier. Les valeurs de croissance/technologie, au cœur de la correction actuelle, devraient dans un deuxième temps profiter de la baisse des taux longs comme c’est déjà le cas pour les secteurs Services aux collectivités et Télécoms, de caractère défensif et sensibles aux taux longs (endettement important des entreprises de ces secteurs).