La création monétaire peut-elle continuer ?

La création monétaire peut-elle continuer ?

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Il y a deux façons de faire monter le prix des actions : soit leur potentiel de croissance à venir est important et, par anticipation, la valeur de ces actions augmenteront ; soit on augmente la masse monétaire, c’est-à-dire le nombre d’euros en circulation, et… ces nouveaux euros fraîchement créés vont chercher à s’investir coûte que coûte dans les actions des sociétés, sans prendre la moindre attention à la situation réelle et aux perspectives réelles de ces entreprises.

En effet, dans ce dernier cas, la seule certitude que la masse monétaire continuera d’augmenter, suffit à vous donner la certitude de la hausse ininterrompue de ces actions.

Nous sommes absolument dans la seconde situation, celle dans laquelle ce n’est pas vraiment la solidité des entreprises et des perspectives qui font monter les objets dans la baignoire ; mais simplement le fait que le robinet d’eau à été ouvert avec force… En effet, les politiques monétaires très accommodantes de la Fed, de la banque centrale du Japon, ainsi que les 1039 milliards d’euros prêtés ces trois derniers mois aux banques européennes pour leur éviter des faillites en chaînes dès fin décembre 2011, ont créé les conditions pour qu’un torrent de liquidités se déverse sur mes marchés du monde entier. La très forte hausse de l’ensemble des marchés actions mondiaux ces trois derniers mois en est la conséquence naturelle.

Nous avons également vu les taux d’emprunt des Etats européens notamment baisser sensiblement (hors Portugal) – ce qui est une très bonne nouvelle, et justifie les commentaires nombreux ces derniers temps, selon lesquels la crise financière est derrière nous, et que tout semble aller pour le mieux : de la même manière, ce n’est que la très forte abondance de liquidités au niveau mondial depuis trois gros mois, qui permet aux Etats en difficultés de la zone euro de trouver des prêteurs, même à des taux en assez nette baisse.

 


2011 / 2012 : la troublante analogie

Nous sommes restés très prudemment exposés au risque marché pendant cette période de très forte hausse, et continuons de conserver notre parti pris de prudence affirmée.

En effet, nous avons déjà connu ce type de «distorsion» des marchés au premier semestre de l’année dernière : souvenez-vous, la Fed inondait le monde de dollars US fraîchement créés (le fameux QE2), et cet argent s’est déversé sur l’ensemble des marchés actions, en particulier sur ceux qui avaient le plus baissé (banques européennes en particulier), sans considération aucune de leurs fondamentaux. Déjà au premier semestre 2011, nous entendions les commentateurs optimistes parler de la fin de la crise de l’eurozone, de la fin de la crise financière. Et la valeur des banques européennes a progressé de près de 20% pendant le seul mois de janvier 2011…

A cette époque déjà, nous ne croyions pas à ces sirènes optimistes : nous sommes portés naturellement vers les fondamentaux…qui étaient catastrophiques…

Or, la forte création monétaire de la Fed a pris fin le 30 juin 2011 précisément. Et, dans les semaines qui ont suivies, l’ensemble des marchés se sont très brutalement effondrés ; les banques françaises ont perdues près de 60% de leur valeur boursière en moins de deux semaines (!) au courant…du mois d’août 2011 ; etc… Et finalement, notre prudence a été plus que justifiée.

Il semble bien que l’année 2012 commence sous les mêmes auspices que l’année 2011: forte création monétaire (au niveau mondial cette fois-ci, et plus seulement américaine), forte hausse des marchés actions et vent d’optimisme généralisé…

 


L’Histoire se répète-t-elle ?

La grande question est la suivante : la fin de l’histoire sera-t-elle identique à 2011? La baignoire est-elle pleine ? ou peut-on encore ajouter des liquidités ?

L’Histoire ne se répète jamais : nous pouvons le tenir pour acquis. Mais certaines époques présentent des analogies.

La plus importante de ces analogies est pour nous que, derrière une apparente réussite du sauvetage européen (l’abandon de 50% de la dette grecques par les banques a été réussie en mars ; le déclenchement des CDS, moyennant une « loufoque » manipulation de la commission de l’ISDA, a pu se faire sans conséquences ; le pacte de rigueur budgétaire européen semble de plus en plus accepté ; et…les taux d’emprunts des Etats baissent: que demander de plus?), mais derrière ces «réussites», la cohésion européenne semble en réalité de plus en plus menacée. Comme en 2011.

A peine créées, les nouvelles obligations grecques (réduite à 50% de la valeur initiale de la dette) ne valent plus que 20% de leur valeur (soit 10% de la valeur initialement empruntée) ; le Portugal est en négociation d’un second plan de sauvetage, malgré son incapacité à tenir les engagements assez irréalistes exigés en particulier par l’Allemagne ; l’Espagne a présenté un déficit budgétaire 2011 très nettement supérieur à ce qui avait été convenu avec le FMI et la commission européenne en échange de son aide financière, et se trouve officiellement dans l’incapacité d’honorer ses engagements pour 2012 ; elle a donc négocié avec ses prêteurs un assouplissement des mesures et des objectifs exigés (mais même ces derniers pourront-ils seulement être tenus, alors que la zone euro confirme son entrée en recession ?) ; l’Italie, juste après avoir adopté la « règle d’or » budgétaire européenne, a officiellement déclarée qu’elle ne serait pas en mesure de la respecter; puis à leurs tours, la Hongrie, l’Irlande…ont emboîtés le pas de l’Espagne, en exigeant pour elles-aussi un assouplissement des mesures exigées, voire menacent de ne pas rembourser certaines échéances de prêts de la troïka (FMI, BCE, commission européenne) s’il ne leur est accordé une remise sur leur taux d’emprunt déjà nettement inférieur à ce qu’elles auraient pu obtenir sur les marchés (c’est le cas de l’Irlande)… Citigroup vient d’annoncer qu’il lui semble inévitable que…l’Espagne ait besoin d’un plan d’aide en 2012…

De l’autre coté, des grèves inédites en Allemagne témoignent du mécontentement de la population allemande face à la rigueur salariale : le point culminant est une grève d’avertissement nationale en Rhénanie du Nord – Westphalie en mars 2012. Au cours de la première vague de grève d’avertissement, 55 000 personnes avaient refusé de travailler. Comment, dans ces conditions de mécontentement, faire accepter au peuple allemand la facture immense du sauvetage des pays du Sud ? Un accord « définitif » (que l’on attend depuis mai 2010…) nous est encore une fois promis pour ces jours-ci. Nous verrons…

En outre, last but not least, des élections d’importance s’approchent pour l’Europe. D’abord, en Grèce, tout a été fait pour annuler les élections législatives en Grèce initialement prévues au mois d’avril. En effet, les mesures exigées de la Grèce étant particulièrement lourdes…, il est nécessaire que soient élus les partis qui ont acceptés de mettre en œuvre ce plan de réforme. Or, le parti communiste grec, d’ordinaire crédité de moins de 5% d’intention de vote, est aussi le seul à n’avoir pas signé la feuille de route exigée par la troïka. Il est aujourd’hui crédité de près de 40% d’intention de votes. En cas de victoire, l’ensemble des négociations entre la Grèce et le reste de l’Europe serait simplement annulées.

Une situation analogue se présente en France : le candidat socialiste, favori dans l’opinion, a annoncé qu’il renégocierait les accords budgétaires européens ; et il semble que la politique proposée ne tiennent pas compte aussi rigoureusement qu’il le faudrait des nécessités d’assainissement budgétaire de la France. Que ne verrait-on pas si la France, pilier de la construction européenne, venait elle-même à ne pas respecter, et à remettre en cause officiellement, les accords si durement obtenus (et pourtant si clairement insuffisant) ?

En résumé, la corde qui relie les pays du sud de l’Europe à ceux du nord ressemble de plus en plus à la corde du pendu.

Mais l’abondance de liquidité injectées par les différentes banques centrales (en particulier européenne) a permis aux marchés de raconter une bien belle histoire.

La question est ainsi bel et bien : la création monétaire mondiale peut-elle continuer ? La réponse, aujourd’hui, à cette question est des plus difficile – c’est d’ailleurs ce qui explique la correction actuelle des marchés, correction que nous attendions patiemment.

Aux USA, la Fed se demande si elle devra mettre en œuvre un QE3? Il semble que, selon certaines rumeurs, certaines décisions seraient en discussion pour permettre aux USA d’utiliser leurs réserves stratégiques de pétroles en cas d’injection monétaire massive (QE3), afin d’éviter que, comme en 2011, la spéculation sur le pétrole ne brise le peu de croissance mondiale en cas de forte injection monétaire en USD… Des discussions sont également en cours pour étendre ce dispositif en Europe. Ceci pourrait être, pour nous, un vrai signal d’augmentation de notre exposition au risque.

En Europe, des rumeurs (invérifiables mais persistantes), signalent que l’Allemagne, ulcérée par ce prêt de 1039 milliards € par la BCE aux banques européennes, l’Allemagne aurait « intimé l’ordre » à la BCE de cesser ses achats d’actifs séance tenante. Il paraît dans ces conditions difficile de penser qu’un nouveau prêt aux banques soit à l’avenir encore possible.

Enfin, les pays émergents font face à des afflux de dollars US et d’euros en masse, qui sont susceptibles de faire renaître certaines pressions sur leurs devises et éventuellement inflationnistes (comme en 2011…). Pour contrer ces effets peu souhaitables, la plupart des pays émergents ont cessés préventivement les mesures d’accroissement des liquidités sur les marchés et leur économie…dans l’attente des décisions de la Fed et de la BCE.

Ainsi, beaucoup d’incertitudes pèsent sur le caractère durable ou non de ces injections de monnaies. Nous surveillons ceci avec la plus grande attention : face aux risques que le réel ne reprenne le dessus sur la liquidité, nous demeurons pour l’heure particulièrement prudents au sein de nos portefeuilles. Nous maintenons nos positions et n’avons pas réalisé d’arbitrage depuis le début de l’année.

 


Mandat spécial

De même, nous n’avons pas encore investi notre mandat spécial n°1, malgré le caractère positif de l’ensemble de nos indicateurs. L’explication de notre prudence se trouve ci-dessus.

Par ailleurs, nous rappelons à nos clients entrerons une nouvelle sicav (voire deux) lorsque nous investirons ce mandat : elles permettront d’investir également sur les obligations des pays émergents, et non plus seulement sur les actions.

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